L’autisme et le sens des mots !

Bonjour,

L’autre soir, un responsable de premier plan, lors du 20 heures de France 2, a déclaré volontarium, à trois reprises, devant la France entière, répondant ainsi aux questions du journaliste : « Je ne suis pas autiste ! ». À sa « décharge », d’autres avant lui, notamment deux éminents journalistes, ont déjà abusé mal à propos de cette approximative rhétorique et dévoyé à réplétion ce vocable, lors d’interviews.

Nous accédons au monde à travers les mots, les mots justes trouvés au bon moment. Cette phrase prononcée devant des millions de Français m’a affecté au plus haut point. Les mots sont là pour faire rire ou pleurer, défendre des idées, provoquer, susciter, enseigner et éduquer, à la condition sine qua non de bien maîtriser la langue française, pourtant « riche », au sens littéraire. Mais les mots, parfois, peuvent offenser, quand ils sont employés à contresens, surtout à mauvais escient.

Quand j’écris, je me relis sans cesse afin de me demander si les autres comprendront ma pensée et la personne que je suis (ce n’est jamais simple !). Si je blesse, je m’excuse de ma maladresse sémantique ou du malentendu syntaxique. Personne n’est à l’abri d’un faux pas (sauf les imbéciles qui ont toujours raison !), alors il faut avoir en soi l’humilité nécessaire pour reconnaître ses failles, même « à l’insu de son plein gré ! ». C’est cette humilité-là qui fait les grands hommes, pas l’obstination ni l’ignorance !

Je pense aux 650.000 autistes, dont certains regardaient certainement la télé ce dimanche soir, quant à trois reprises, l’interviewé a répété « qu’il n’était pas autiste ». Ils ont compris, bien évidemment — ils ont une intelligence supérieure au citoyen lambda — qu’ils n’étaient pas « normaux », puisqu’eux, ils étaient « véritablement » atteints de ce « handicap », le syndrome d’Asperger.

Mais de quoi parlait cet homme à la « normalité reconnue », de quoi se défendait-il ? De n’être pas un autiste qui, dans l’imaginaire collectif, est un être complètement enfermé dans son monde ! Mais l’autisme a tellement de visages différents. Il a le visage de ces jeunes enfants à l’intelligence hors normes. Il a le visage de ces personnes qui souffrent mais qui sont capables de vous réciter n’importe quel poème par cœur. Il a le visage de tous ces gamins pour lesquels les parents se battent au quotidien. Il a aussi le visage de ceux que l’on enferme dans des hôpitaux parce que notre vieux et grand pays, notre chère France a énormément de retard sur la prise en charge de ces personnes.

Les mots ont un sens qu’il nous faut tous respecter pour ne pas que la pensée se perdît dans les abîmes de l’indicible. Les mots sont capables d’ouvrir à la différence ou d’enfermer dans de terribles clichés qui se banalisent tellement qu’ils deviennent des ÉLÉMENTS DE LANGAGE que tout le monde finit par trouver admissibles. Mais lorsque ces préjugés deviennent des discriminations, il est trop tard.

Les femmes, les juifs, certaines populations, les trisomiques, les homosexuels en ont tous fait les frais tout au long de l’Histoire. Il ne faudrait pas que les personnes autistes et/ou handicapées soient les nouvelles cibles de cette société aseptisée, égocentrique, rabougrie, où la tendance est à la « lobotisation » des cerveaux plus qu’à l’éclosion de futurs prix Nobel. Il ne faudrait pas que la mauvaise employabilité des mots devînt in fine la normalité de tous les maux de cette société en crise et en perpétuelle déliquescence !

Guylem Gohory (sociétaire de la Beurnotte)

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